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Projet de loi de finances pour 2011 : Défense
La gestion des ressources humaines sera complexifiée en 2011 par les conséquences de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.
Le problème concerne l'application de l'article 45 de la loi, relatif au minimum garanti des fonctionnaires, au cas particulier des militaires non officiers.
Ceux-ci sont en quasi-totalité des contractuels, qui signent des contrats successifs d'une durée moyenne de cinq ans. Presque tous quittent l'armée avant quinze ans de services. Cependant, une petite minorité quitte l'armée après quinze ans, et bénéficie donc, selon le droit actuel, d'une pension dite « à jouissance immédiate », c'est-à-dire qu'ils perçoivent environ 600 euros par mois dès le moment où ils quittent l'armée. Tous ne choisissent pas la date de leur départ, c'est l'institution qui la leur impose du fait de l'impératif de jeunesse du métier des armes. Comme cela a été souligné dans un rapport d'information25(*) de 2008 du rapporteur spécial François Trucy et de notre ancien collègue Yves Fréville fait au nom de la commission des finances, il ne s'agit pas là d'une « faveur » faite aux militaires, mais de la contrepartie du fait qu'ils sont moins bien payés que leurs homologues étrangers, en particulier britanniques.
Il résulte de la réforme des retraites que, pour continuer à bénéficier de cette pension à jouissance immédiate à son niveau actuel, ces militaires vont devoir passer non de 15 ans de services à 17 ans de services, mais de 15 ans à 19,5 ans de services. En effet, le montant qu'ils perçoivent actuellement correspond au « minimum garanti », qui fait l'objet de l'article 45 précité. Actuellement ils peuvent bénéficier du minimum garanti dès 15 ans de services. En l'absence du minimum garanti ils subiraient une décote jusqu'à 17,5 ans de services, mais ce phénomène est neutralisé par le minimum garanti.
La réforme des retraites augmente la durée de services nécessaire pour bénéficier de la retraite à jouissance immédiate de 2 ans, ce qui la porte progressivement de 15 à 17 ans, et porte donc la décote jusqu'à 19,5 ans. Par ailleurs, l'article 24 précité fait passer dès le 1er janvier 2011 la durée de services permettant de bénéficier du minimum garanti de 15 ans à celle d'annulation de la décote, donc à 19,5 ans à terme. La durée de services nécessaire pour percevoir le montant actuel du minimum garanti passera donc brutalement au premier janvier 2011 de 15 ans à 17,5 ans.
On peut imaginer deux militaires non officiers. L'un quitte le service le 31 décembre 2010, l'autre le 1er janvier 2011. Le premier perçoit une pension à jouissance immédiate de, par exemple, 625 euros par mois, s'il est caporal-chef. Le second, qui quitte le service un jour plus tard, ne perçoit plus que 456 euros, soit 30 % de moins, parce qu'il ne bénéficie plus du minimum garanti. Ce militaire devrait rester dans l'armée quatre ans de plus pour percevoir la même pension que son camarade.
A l'initiative de son rapporteur Dominique Leclerc, la commission des affaires sociales du Sénat a présenté un amendement tendant non à remettre en cause cette évolution, mais à en lisser l'effet. Il s'agissait de prévoir que pour les militaires non officiers ayant fait au moins 10 ans de service au 1er janvier 2011, et qui par conséquent avaient conclu leur troisième et dernier contrat, le droit actuel relatif au minimum garanti continuait de s'appliquer. Un sous-amendement de notre collègue Marc Laménie a toutefois limité le champ de l'amendement aux militaires non officiers qui avaient atteint quinze ans d'ancienneté au 1er janvier 2011.
Georges Tron, alors secrétaire d'État à la fonction publique, a évoqué à cette occasion la mise en place par voie réglementaire d'un dispositif de pécule26(*).