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"Un certain temps..." de travail des militaires selon la Cour de justice de l'UE


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http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/01/29/le-temps-de-travail-des-militaires-21842.html

http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/media/01/00/1976932473.jpg

La Cour de justice de l’Union européenne a eu à répondre à deux questions épineuses et récurrentes sur l'effet d'une directive européenne sur le temps de travail des militaires et en particulier lorsqu'ils montent la garde. Les réponses de l'avocat général ont suscité le désaveu courroucé de Jean-Louis Borloo qui s’est fendu d’une tribune, vendredi, dans le Figaro. Mais finalement, leur teneur relève de la célèbre réponse de l'humoriste Fernand Raynaud... On n'est pas beaucoup plus avancé après...

http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/media/00/02/212141271.jpg

Voici ces deux questions :
- L’article 2 de la directive 2003/88/CE s’applique-t-il également aux travailleurs qui travaillent dans le domaine de la défense et aux militaires qui effectuent des gardes en temps de paix ? *
- L’article 2 de la directive 2003/88/CE fait-il obstacle à une réglementation nationale en vertu de laquelle les périodes d’astreinte des travailleurs qui travaillent dans l’armée, effectuées sur le lieu de travail ou en un endroit déterminé (mais pas à domicile) et la présente des militaires qui travaillent dans le domaine de la défense en périodes de garde, lorsque ces militaires n’effectuent pas de travail effectif, mais doivent être physiquement présents dans la caserne, ne sont pas incluses dans le temps de travail ?

Dans quel contexte ont-elles été posées?
Ces questions s’inscrivent dans le cadre d’un litige opposant un ancien sous-officier de l’armée slovène au ministère de la Défense de Slovénie, son ex-employeur, au sujet de la rémunération devant lui être versée en contrepartie de l’activité de garde d’installations militaires qu’il a régulièrement effectuée au cours de son service.

Dans ce contexte, la juridiction de renvoi invitait la Cour à préciser si les personnes exerçant des fonctions militaires dans les forces armées des États membres relèvent du champ d’application de la directive 2003/88 et si, en conséquence, leur temps de travail doit être comptabilisé, aménagé et limité conformément aux prescriptions de cette directive, y compris lors d’une telle activité de garde.

Voici un résumé des conclusions/suggestions de l’avocat général de la Cour de justice de l’UE Henrik Saugmandsgaard présentées le 28 janvier 2021 (l'intégralité de sa réponse est à lire en français ici).

1) L’article 1er, paragraphe 3, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail, lu en combinaison avec l’article 2, paragraphe 2, de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, doit être interprété en ce sens que les militaires relèvent, en principe, du champ d’application de ces deux directives. Néanmoins, ils en sont exclus lorsqu’ils effectuent certaines « activités spécifiques » des forces armées, dont les particularités inhérentes s’opposent de manière contraignante à l’application des règles de ces deux directives. Une activité de garde des installations militaires n’en fait, en principe, pas partie.

2) L’article 2, point 1, de la directive 2003/88 doit être interprété en ce sens que, aux fins de l’application des règles en matière de santé et de sécurité prévues dans celle-ci, la période au cours de laquelle un militaire est tenu, durant une activité de garde, de demeurer présent dans la caserne où il est affecté, à la disposition de ses supérieurs, sans effectuer de travail effectif, doit être considérée, dans son intégralité, comme du « temps de travail », au sens de cette disposition. 

Chacun y trouvera matière à râler ou à estimer avoir raison. Bon, puisqu'on ne tranche pas sur le temps de travail des militaires, peut-être faudra-t-il que la Cour de justice se penche sur celui des contractors/sous-traitants en opex... Qui veut bien la saisir?

Ya Rab Yeshua.

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  • 2 mois plus tard...

http://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/archive/2021/04/14/temps-de-travail-des-militaires-22047.html

Temps de travail des militaires : le Haut comité d’évaluation de la condition militaire s'en mêle

 

L’éventualité de la reconnaissance par la Cour de justice de l'Union européenne de l’applicabilité de la directive du 4 novembre 2003, dite "du temps de travail", aux militaires a provoqué pas mal d'émoi. Ce qui a conduit le Haut comité d’évaluation de la condition militaire à formuler un avis.

J'avais, le 31 janvier, consacré un post à cet avis de la Cour de justice de l'UE. Il est à lire ici

Le 9 avril, le HCECM a donc diffusé une note mise en ligne le 13. Elle est à lire ici

Le HCEM rappelle que parce qu’elles seraient "incompatibles avec la nécessaire libre disposition de la force armée, les règles fixant la durée de travail tant des salariés que des fonctionnaires ne sont pas applicables aux militaires". 

L’application de la directive européenne aux forces armées serait aussi de nature à entraîner les conséquences suivantes :
- une remise en cause des fondements de l’état militaire, qui "exige en toute circonstance esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu'au sacrifice suprême … disponibilité...";
- des modifications substantielles de l’organisation et du fonctionnement des forces armées pour des raisons étrangères aux objectifs de défense ;
- une baisse de la capacité et de l’efficacité opérationnelle des forces armées.

Enfin, le Haut comité considère que la détermination et l’organisation du temps de service des militaires, dans ses principes comme dans ses modalités, doivent relever des seules autorités responsables de la sécurité nationale.

Ya Rab Yeshua.

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  • 3 mois plus tard...

http://www.opex360.com/2021/07/16/temps-de-travail-des-militaires-la-cour-de-justice-de-lue-donne-tort-a-la-france/

La Cour de justice de l’UE donne tort à la France

 

Lors de son discours prononcé à l’Hôtel de Brienne, le 13 juillet, le président Macron a été clair au sujet du statut – et donc de la singularité – des militaires, en déplorant que « l’air du temps, parfois, peut conduire certains à penser que la banalisation est une bonne chose et que quand d’autres suivent cette voie, il faudrait mécaniquement la suivre ».

« Je suis un ardent Européen et je crois à la voie européenne quand je la comprends et que je pense qu’elle est bonne pour le destin national » mais « lorsqu’elle nous conduit à renier ce qui nous défend, ce qui nous protège, une militarité à laquelle nous tenons au-dessus de tout, nous n’y cédons pas », a dit le chef de l’État, dans une allusion à la directive européenne 2003/88 relative au temps de travail.

Et celui-ci d’ajouter : « Nous avons défendu notre statut, nous avons mené des batailles et des victoires importantes et nous irons au bout. Un statut vivant dont les principes fondamentaux doivent être rappelés, valorisés, défendus au niveau national comme en Europe. Nous tiendrons bon jusqu’au bout ».

Deux jours plus tard, la Cour de justice de l’Union européenne [CJUE] a justement rendu un arrêt sur l’application de cette directive sur le temps de travail, après avoir été appelée à se prononcer sur un litige opposant un sous-officier slovène à sa hiérarchie, ce dernier estimant qu’une rémunération aurait dû lui être versée « en contrepartie de l’activité de garde d’installations militaires qu’il a régulièrement effectuée au cours de son service ».

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Aussi, la question était donc de savoir si les militaires des États membres de l’UE relevaient ou non du champ d’application de la directive… et si leur temps de travail devait être « comptabilisé, aménagé et limité conformément aux prescriptions de cette directive, y compris lors d’une telle activité de garde ». De quoi remettre en cause la notion de service « en tout temps et en tout lieu », qui est l’un des fondements du statut général des militaires en France.

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Dans les conclusions qu’il a présentées le 29 janvier dernier, l’avocat général de la CJUE, Henrik Saugmandsgaard Øe, s’est aligné sur la conception défendue par l’Allemagne, laquelle consiste à faire la distinction entre le « service courant » et les activités « spécifiques », c’est à dire opérationnelle. Pour autant, la France, mais aussi l’Espagne, n’ont pas baissé leur pavillon.

Ainsi, en avril, le Haut Comité d’évaluation de la condition militaire [HCECM] a publié un avis pour réfuter les arguments de l’avocat général de la CJUE, notamment en s’appuyant sur l’article 4.2 du Traité de l’UE, lequel précise que « l’Union respecte les fonctions essentielles de l’État, notamment celles qui ont pour objet d’assurer son intégrité territoriale, de maintenir l’ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale » et que, « en particulier, la sécurité nationale reste de la seule responsabilité de chaque État membre ».

En outre, le HCECM a également mis en garde sur les conséquences que pourrait avoir l’application de cette directive sur les forces armées. Et d’y voir une possible atteinte à leur cohésion ainsi qu’une baisse de leur capacité et de leur efficacité opérationnelle en raison « du contingentement de la disponibilité des militaires et des rigidités impliquées par sa mise en œuvre ».

Finalement, dans l’arrêt C-742-19 qu’elle a rendu le 15 juillet, la CJUE a estimé qu’il « ne saurait être considéré que l’intégralité des activités exercées par les militaires présentent des particularités telles que celles-ci s’opposent à toute planification du temps de travail respectueuse des exigences imposées par la directive 2003/88 ».

Qui plus est, ajoute-t-elle, « certaines activités susceptibles d’être exercées par les membres des forces armées, comme celles liées notamment à des services d’administration, d’entretien, de réparation, de santé, de maintien de l’ordre ou de poursuite des infractions, ne sauraient être exclues, dans leur intégralité, du champ d’application de la directive 2003/88 », dans la mesure où il « est constant que de telles activités relèvent, en principe, du champ d’application de cette directive lorsqu’elles sont exercées, dans des conditions similaires, par des travailleurs de la fonction publique n’ayant pas le statut de militaire ».

En revanche, pour la CJUE, les activités opérationnelles ainsi que celles liées à la formation n’entrent pas dans le cadre de la directive. Directive qui est « est tout aussi inapplicable aux activités militaires qui sont à ce point particulières qu’elles ne se prêtent pas à un système de rotation des effectifs permettant d’assurer le respect des exigences de cette directive », précise-t-elle. Idem « lorsqu’il apparaît que l’activité militaire est exécutée dans le cadre d’événements exceptionnels ».

« Enfin, il y a lieu de préciser que, même lorsque des militaires exercent des activités qui relèvent pleinement du champ d’application de la directive 2003/88, celle-ci contient, contrairement à ce que soutient le gouvernement français, des exceptions aux droits qu’elle instaure, susceptibles d’être invoquées par les États membres à l’égard de ces militaires », fait aussi valoir la CJUE.

Cet arrêt, contre lequel aucun recours n’est possible, ouvre donc une brèche dans le statut général des militaires en remettant en cause la notion de service « en tout temps et en tout lieu ». Et le ministère des Armées est désormais à la merci d’une plainte venant de ses propres rangs pour faire appliquer la directive en question. En cas de litige, le Conseil d’État aurait alors à se prononcer.

Ya Rab Yeshua.

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